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François Joseph Bosio, La nymphe Salmacis, après 1826.⁣⁣ MBAM, prêt de R. Moat. Photo MBAM.⁣⁣
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Le corps

Une réflexion sur ses représentations

Durée : 30 à 45 minutes
Pavillon pour la Paix Michal et Renata Hornstein

Ce parcours rassemble une variété de représentations du corps humain, sur plusieurs périodes de l’art occidental dans des approches artistiques aux modes d’expression différents. Chaque œuvre que nous vous proposons témoigne d’une époque et d’une vision personnelle. Nous verrons que les artistes sélectionnés utilisent le corps humain – avec et sans habits – pour témoigner, exprimer, faire ressentir, émouvoir et susciter une remise en question chez le visiteur. Qu’il soit réaliste ou transcendé par la vision personnelle d’un artiste, le corps humain représenté dans ces œuvres est toujours unique et habité d’une histoire qui lui est propre.

Afin d’enrichir votre expérience, nous vous invitons à prendre le temps de vous déplacer dans l’espace afin de multiplier les points de vue. Quelques questions en début de chaque étape vous amèneront à observer les œuvres et à les interpréter à votre façon. Si vous êtes en groupe ou en famille n’hésitez surtout pas à partager vos réflexions afin de faire de ce parcours une expérience ludique et interactive.

Laissez-vous surprendre et commençons notre voyage au niveau 1.

Sommaire

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Jef Lambeaux, L’homme blessé

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Niveau 1

Quel effet cette œuvre produit-elle sur vous? Si vous deviez décrire cette œuvre à un ami, quels éléments distinctifs choisiriez-vous? D’après vos observations, quels éléments de la sculpture expriment la douleur du personnage? Si vous pouviez lui poser une question, que lui demanderiez-vous?

Voici une œuvre caractéristique du peintre belge néo-baroque Jef Lambeaux, l’un des artistes les plus importants du XIXe siècle dans son pays. Une silhouette nue, expressive, en pleine torsion et dont l’expression faciale illustre toute la douleur physique du personnage. Il nous appartient donc d’imaginer quelle est sa souffrance : physique ou psychologique ? Cette sculpture, Le Blessé, est en réalité une réplique en bronze du personnage central Le Suicidé des « Passions humaines » (1886-1898) un immense bas-relief de marbre du même artiste qui fit scandale à l’époque. Cette œuvre gigantesque, actuellement exposée à Bruxelles, représente des hommes et des femmes nus exprimant une foule d’émotions et d’états d’âme, allant de l’amour passionnel au désespoir. À la fois violente et sensuelle, l’œuvre d’art choqua les plus conservateurs, mais lui valut tout de même une médaille d’honneur à l’Exposition universelle de Paris en 1900.

Le choix d’isoler une figure d’un bas relief pour en faire une œuvre autonome était pratique assez courante chez les sculpteurs de l’époque. Auguste Rodin, que Jef Lambeaux connaissait personnellement, a opté pour ce même procédé avec son célèbre Penseur que nous pouvons voir dans la salle adjacente.

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Aristide Maillol, Torse de jeune femme

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Niveau 1

Regardez les quelques portraits dans la salle. Lequel de ces visages aimeriez-vous jumeler avec ce corps? Ce torse est en bronze. À votre avis, avec quelle matière l’artiste en a-t-il créé la première version? Voici une proposition de beauté féminine datant de 1935. Quelles différences pouvons-nous constater avec les critères de beauté de notre époque?

Ce bronze unique représente un nu féminin tout en finesse et en simplicité. Cette sculpture, dont l’absence de tête et dont d’expression confine le modèle à l’anonymat, reflète l’idéal de beauté selon Maillol. Ce grand modeleur, dont Rodin admirait le talent, a consacré une grande partie de sa carrière à la sculpture de formes féminines, avec ou sans tête, en pied ou en torse. Il s’est concentré sur la recherche d’un idéal formel dans la simplification les volumes de ses modèles. D’abord modelée en argile, la sculpture a ensuite été coulée en bronze dans une fonderie. On peut en voir ici le résultat final.

La pureté de la ligne, la brillance du bronze et la sérénité de la frontalité du corps en léger contrapposto évoquent la statuaire antique dont Maillol était un fervent admirateur. Aristide Maillol ne désire pas raconter, il propose une simplification des formes, en rupture totale avec le descriptif. Nous voici devant un corps de femme, immobile, témoin d’une recherche esthétique que Maillol a poursuivie durant tout son parcours de sculpteur.

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Julio González, L’homme Cactus

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Niveau 1

Quels sont les 3 mots qui vous viennent spontanément en tête devant cette œuvre? D’après vos observations, quels éléments de la sculpture sont de nature humaine et lesquels relèvent plutôt du monde végétal? L’idée d’un « corps-cactus » vous amène à ressentir quelles sensations?

L’artiste espagnol Julio González a créé cette sculpture mi-humaine mi-cactus à la fin de la guerre civile en Espagne. En 1939, il assiste à l’avènement du franquisme à la suite duquel sa région natale, la Catalogne, se voit ravagée par des combats et des massacres.

González propose ici un corps hybride piqué de véritables clous qui évoquent non seulement la souffrance humaine causée par la dictature, mais aussi le rejet de l’injustice de même que l’endurance et la résistance. Cet être surréaliste et métaphorique devient ici un moyen d’expression pour l’artiste lui permettant de témoigner de la souffrance de son peuple.

Considéré à l’époque comme le fondateur de la sculpture moderne en fer, Julio Gonzáles a travaillé, notamment, avec Pablo Picasso qui admirait sa dextérité et son talent.

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Yannick Pouliot, Autoportrait

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Niveau 2

De quoi est composée cette œuvre contemporaine? En allant voir de l’autre côté, que remarquez-vous? En regardant les œuvres qui nous entourent, quels liens stylistiques ou thématiques pourrions-nous faire avec cette œuvre?

Ce grand miroir sans tain, œuvre contemporaine créée à l’occasion de l’ouverture du pavillon pour la Paix en 2016, nous renvoie à notre propre image. Au premier regard, nous apercevrons la sculpture au verso, mais également le reflet de notre corps et de notre visage, comme sur un daguerréotype. Nous figurons alors dans l’œuvre pendant quelques secondes. Par la suite, en allant de l’autre côté, nous passons à l’observation et l’œuvre se transforme en fenêtre à travers laquelle regarder nos semblables.

À l’ère des égoportraits, l’artiste Yannick Pouliot joue avec la tendance à nous prendre en photos dans les espaces que nous visitons et nous permet même de devenir voyeurs lorsque nous nous trouvons de l’autre côté du miroir. Réflexion sur la richesse et l’apparence, avec un encadrement d’une esthétique rococo typique du XIIIe siècle, l’œuvre nous place face à nous mêmes, à notre propre regard sur ce qui nous entoure, à notre héritage artistique occidental et aux valeurs qu’il nous a laissés.

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George Romney, Portrait de Sir Robert Gunning

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Niveau 2

Prenez la même pose que cet homme… comment vous sentez-vous? D’après vos observations, quels sont les différents tissus et matières représentés dans ce tableau? Avec son costume et les accessoires qu’il porte, qu’est-ce que le modèle, selon vous, souhaite nous dire? Aujourd’hui, quels sont les vêtements, attitudes et accessoires que l’on attribue aux dirigeants?

Ce tableau représente Sir Robert Gunning, grand diplomate et membre de la noblesse britannique, dans toute sa prestance. Les autres portraits qui figurent à proximité de ce tableau s’inscrivent dans la lignée des portraits de la noblesse très en vogue au XVIIIe siècle. Georges Rowney, très reconnu en Angleterre grâce à ses talents de portraitiste, a également couché sur toiles les portraits de son épouse et de ses deux filles.

La qualité du travail du peintre nous permet de ressentir l’extraordinaire fierté du sujet ainsi que les différentes matières de son costume, dont le satin, le velours, la broderie et les plumes. Les vêtements, la perruque, la posture et l’expression de l’homme, ainsi que le décor qui l’entoure, contribuent à l’image qu’il désire projeter. Remarquez que ses chaussures blanches sont ornées de petits talons rouges, un signe de noblesse. Également, le grand collier d’or sur sa poitrine indique qu’il était membre de l’Ordre du Bain, un honneur accordé par le roi d’Angleterre. L’étoile brodée sur sa cape en est également un des symboles. De nos jours, c’est le prince Charles qui agit comme Grand Maître de l’Ordre du Bain.

François Joseph Bosio, La nymphe Salmacis, après 1826.⁣⁣ MBAM, prêt de R. Moat. Photo MBAM.⁣⁣
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François-Joseph Bosio, Nymphe Salmacis

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Niveau 2

En faisant le tour de cette œuvre, quels sont les détails qui vous frappent le plus? Comment qualifieriez-vous le travail de l’artiste? Dans quel environnement imaginez-vous cette jeune fille ? Selon vous, qu’est-elle en train de faire?

Cette sculpture de marbre représente une nymphe, créature mythologique associée à la nature, qui a notamment été décrite dans les Métamorphoses d’Ovide, écrivain du premier siècle apr. J.-C. Salmacis aimait entre autres se baigner, cueillir des fleurs et contempler son reflet dans l’eau.

La grande qualité du travail artistique de Bosio permet de découvrir un ensemble de textures variées et les veines naturelles du marbre qui donnent vie et singularité à cette sculpture. La délicatesse des orteils et le jeu de vide entre les pieds sont d’une telle précision que l’artiste mérite bien son surnom de Canova français. Grand sculpteur du néo-classicisme français, François-Joseph Bosio est en effet reconnu pour son grand talent, ses figures mythologiques et ses portraits traités avec raffinement.

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Christian Jorhan l’Ancien, Saint Joseph et l’Enfant Jésus

7

Niveau 2

D’après vous, quel lien unit les deux personnages de cette sculpture? En faisant le tour de l’œuvre, quels sont les éléments qui attirent particulièrement votre regard? Selon vous, que sont en train de regarder ces deux personnages?

Habituellement, dans les scènes religieuses représentant la Sainte Famille, nous voyons surtout Marie et Jésus alors que Saint-Joseph est relégué à des rôles secondaires. Or, dans cette sculpture en bois polychrome, Joseph est montré tout en force, protecteur, le corps massif et vêtu d’un drapé dont le traitement accentue le dynamisme de sa position en torsion. Sur son genou gauche, Jésus, presque nu et protégé par la main de son père, lève la main en guise de salut ou de bénédiction. Tous deux regardent au loin, ce qui laisse croire que la sculpture n’était pas conçue comme une véritable ronde-bosse (l’arrière indiquant qu’elle devait être placée contre un mur), mais devait plutôt faire partie d’un retable placé plus haut que le niveau du regard des fidèles. Cette sculpture aurait donc été conçue pour être vue d’en bas.

Notez que Saint Joseph est l’un des patrons du Canada, ayant été choisi comme tel dès 1624 par les premiers colons du Québec. Montréal possède d’ailleurs le plus grand sanctuaire au monde consacré à Saint Joseph : l’Oratoire Saint Joseph.

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Tilman Riemenschneider, Saint Sébastien

8

Niveau 4

Au premier regard, quels sont les éléments de cette sculpture qui vous interpellent? Si vous pouviez peindre sur le bois, quelles couleurs choisiriez-vous? À votre avis, qu’est-il en train de vivre?

En observant cette œuvre de près, nous remarquons très vite de nombreuses petites perforations sur toute sa surface. Ces trous, créés par de petits vers qui se sont logés dans le bois, nous rappellent à quel point chaque œuvre est fragile et tributaire des conditions dans lesquelles elle est conservée. Autrefois polychrome, la sculpture ne conserve que quelques légères traces de peinture blanches et rouges. À nous donc de l’imaginer colorée, comme la plupart des sculptures de bois de l’époque.

Ce Saint Sébastien, martyr de l’histoire chrétienne du IIIe siècle, est représenté ici dans un drapé en mouvement originellement percé de flèches (poitrine, jambes, bras, cou). Ces flèches, très fragiles, ont malheureusement disparu.

L’artiste, Tilman Riemenschneider, est l’un des sculpteurs allemands les plus importants de son époque. Sa façon de représenter les visages et les corps est facile à reconnaître: visage fin avec yeux en amande, menton un peu pointu, mouvement de la chevelure, membres très allongés et position en contrapposto.

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Andréa Mantegna, Judith avec la tête d’Holopherne

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Niveau 4

En comparant l’arrière-plan et les personnages, quelles différences remarquez-vous? Selon vous, quel est le personnage le plus important dans cette scène? Pourquoi? Comment sont les expressions des visages dans ce tableau?

Deux personnages féminins qui mettent une tête dans un sac, une épée, un décor peu défini… Cette scène nous montre Judith (tenant l’épée), héroïne juive qui libéra son peuple hébreu de l’emprise du militaire Holopherne en lui tranchant la tête alors qu’il s’était endormi ivre.

Même si l’événement, tiré du Livre de Judith de l’Ancien Testament, est d’une grande violence, le sujet est traité ici avec calme. Les visages des deux femmes, la posture de Judith ainsi que le drapé des vêtements évoquent clairement la sculpture antique. Judith et sa servante sont ici peintes à la détrempe, technique mise au point durant l’époque médiévale où on utilisait des œufs afin de lier les pigments. Tout comme l’œuvre à votre droite dont elle est indissociable (Didon), cette toile a été commandée à Mantegna par Isabelle d’Este qui souhaitait probablement l’intégrer à son Studiolo, petit cabinet privé consacré à la contemplation d’œuvres d’art et aux conversations intellectuelles. La série complète était composée de plusieurs toiles du même format, toutes représentant des héroïnes de l’Antiquité. Voici qui faisait un sujet fascinant pour le Studiolo d’une dame...

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Anthony Gormley, Turn V

10

Niveau 4

Quelle est votre première réaction devant cette sculpture? Comment pourriez-vous interpréter cette façon originale de représenter le corps humain? Selon vous, comment se sent-il (elle)? À présent, fermez les yeux et ressentez votre corps de l’intérieur… Quelles formes (géométriques ou organiques) voyez-vous?

Cette sculpture d’Anthony Gromley, composée d’un assemblage de cubes de métal, représente un humain en position debout. Ici, l’artiste a voulu représenter des sensations intérieures plutôt que des traits physiques. Gormley a dit : « J’ai passé ma vie à essayer de montrer que le corps est un endroit plus qu’un objet ; la chose la plus précieuse que nous ayons. Quand vous fermez les yeux, vous rencontrez l’énergie, l’imagination, le potentiel qui est à l’intérieur de vous. »

Avec cette œuvre, l’artiste nous dit que les souvenirs s’inscrivent dans notre corps où ils laissent une trace. Dans cette optique, le corps devient le réceptacle de sensations physiques, d’émotions et de souvenirs. Cet ensemble de cubes, abstraction courante dans la démarche de Gromley, est donc une matérialisation de sensations ressenties par le corps et qui se cachent subtilement en nous, tout au long de notre vie.

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