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10 septembre 2024

Nouvelles acquisitions en dialogue

Lets’lo:tseltun – Lawrence Paul Yuxweluptun (1957-), Autochtones jouant sur les terres, 2015, acrylique sur toile, 274 x 183 cm. MBAM, don de W. Bruce C. Bailey en l’honneur de Jacques Des Rochers, conservateur principal de l’art québécois et canadien. © Lawrence Paul Yuxweluptun. Courtesy of the artist and Macaulay & Co. Fine Art | Nicolas Party (né en 1980), Paysage, 2021, pastel sur toile tendue sur panneau de bois, 265 x 180 cm. MBAM, don d’Iris et Adam Singer. © Nicolas Party. Photos MBAM, Jean-François Brière

À l’affiche du 11 septembre 2024 au 5 octobre 2025, l’exposition Deux par deux rassemblés : ajouts récents à la collection du MBAM dévoile une sélection d’œuvres qui ont été acquises au cours des cinq dernières années. Elles sont regroupées de manière à instaurer entre elles un dialogue à propos du sujet traité, de la technique, de la forme, de la fonction ou de l’époque. En plus de mettre en relief la diversité de nos nouvelles acquisitions, l’exposition lève le voile sur les pratiques et approches qui rendent ces ajouts possibles.

Iris Amizlev. Photo MBAM, Christine Guest

Iris Amizlev

Conservatrice des projets spéciaux

Présentée dans plusieurs salles situées au carrefour des cinq pavillons du Musée, cette exposition regroupant peintures, sculptures, œuvres d’arts graphiques, photographies, vidéos, artéfacts archéologiques et objets d’arts décoratifs et de design met en lumière nos divers axes de collectionnement. Fruit de milliers d’années d’histoire et provenant des quatre coins du monde, ces nouvelles acquisitions sont, pour la plupart, dévoilées pour la première fois au public du Musée.

Un processus d’acquisition rigoureux

Fondée au 19e siècle, la collection permanente du Musée des beaux-arts de Montréal est l’une des plus anciennes au Canada. Elle compte près de 47 000 objets provenant des 5 continents et datant de l’ère néolithique à nos jours. Chaque année, plusieurs acquisitions viennent l’enrichir grâce à des dons, à des achats ou à des legs.

Chaque projet d’acquisition est soumis au même processus rigoureux. L’équipe de la conservation mène des recherches poussées pour déterminer si l’objet est susceptible d’apporter une valeur ajoutée aux collections du MBAM, que ce soit en les approfondissant, en les diversifiant ou en les enrichissant de nouvelles perspectives. Dans le cas des objets archéologiques, des recherches supplémentaires sont menées pour en vérifier la provenance et veiller au respect des règles éthiques et juridiques qui régissent la circulation du patrimoine culturel. La question de la provenance est également cruciale pour les œuvres réalisées avant la Deuxième Guerre mondiale, mais acquises ultérieurement. En raison des pillages de guerre, des spoliations d’œuvres d’art par le régime nazi et des ventes forcées de cette période, il faut s’assurer qu’il n’y a pas de lacunes dans l’historique de propriété si l’œuvre est susceptible de s’être trouvée sur le continent européen à l’époque nazie.

Les œuvres sont également évaluées par l’équipe de la restauration, qui en examine l’état et détermine si des interventions sont requises ; des facteurs tels que la fragilité des matériaux et du support, la présence de dommages et des traces de restaurations antérieures inadéquates peuvent peser sur la décision d’acquisition. Si les résultats de l’examen justifient l’intégration de l’objet dans la collection, l’équipe de la conservation présente ses conclusions et en recommande l’acquisition à un comité interne, puis à un comité externe. Du moment où la proposition est acceptée à l’unanimité par les membres de ces comités, et entérinée par le conseil d’administration, l’œuvre est acquise, puis cataloguée, photographiée et restaurée, au besoin.

L’exposition Deux par deux rassemblés constitue avant tout une vitrine sur les stratégies et démarches employées par le Musée pour renforcer ses relations avec les différentes cultures et régions du monde. Tout en continuant à enrichir la collection, nous nous posons d’importantes questions sur le fait que des artistes y sont moins visibles que d’autres. En favorisant l’acquisition d’œuvres d’artistes issus de groupes traditionnellement marginalisés et sous-représentés, nous souhaitons corriger les erreurs du passé et nous assurer que la collection suscite l’intérêt des visiteuses et visiteurs de tous les horizons afin qu’ils s’y sentent inclus et représentés.

Une mise en dialogue pour un regard renouvelé

Les œuvres de l’exposition sont presque toutes regroupées de manière à instaurer entre elles un dialogue à propos du sujet traité, de la technique, de la forme, de la fonction ou de l’époque. Par cette juxtaposition de contrastes et de similitudes, nous espérons susciter des interprétations nouvelles et enrichissantes de notre collection. Nous vous présentons ici quelques-uns de ces regroupements, tout en détaillant la manière dont les œuvres entrent en relation les unes avec les autres.

Contenants en verre, de l’antiquité à nos jours

La photographie de Jessica Eaton intitulée Natura Morta (Luce Danzante) 22 [Nature morte (Lumière dansante) 22], qui représente des bouteilles vides, est la quintessence même de la fluidité de la lumière. L’artiste a créé ce jeu captivant de couleurs, de lumière et de reflets en disposant des bouteilles sur un miroir devant un fond blanc, puis en baignant la scène d’un éclairage coloré.

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En réponse à l’œuvre d’Eaton, un petit arrangement reconstitué est composé d’un gobelet, d’un pot et d’une bouteille datant de l’époque romaine, il y a environ 2 000 ans. Vestiges d’un passé chargé d’histoire, ces récipients ont jadis servi de service de table ou de contenants pour l’huile, le parfum, les cosmétiques et les médicaments.

Les œuvres sur papier étant particulièrement sensibles à la lumière, elles doivent être conservées dans l’obscurité plusieurs années après chaque période d’exposition de quatre mois. Dans un souci de conservation, les dessins et photographies de cette exposition feront donc l’objet de deux rotations. La photographie d’Eaton sera ainsi remplacée par des vases en verre d’Omer Arbel, dont l’agencement se rapprochera de celui des pièces de verre anciennes. Le public pourra observer, en plus de leurs qualités esthétiques, l’évolution de la production du verre, depuis les méthodes traditionnelles de soufflage jusqu’à des procédés plus complexes comme ceux utilisés par Arbel, qui intègrent une maille de cuivre.

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Autoportraits en vis-à-vis

Le célèbre peintre néerlandais du 17e siècle Rembrandt est réputé pour son admirable maîtrise du portrait. Autoportraitiste prolifique, il a également produit pendant sa carrière au moins 55 tableaux, 10 dessins et 28 estampes où il dévoile son état d’esprit et son caractère, comme une fenêtre sur sa vie, et où il exprime une facette de la condition humaine.

L’artiste contemporain Stanley Février conçoit l’art comme un outil de transformation sociale qui peut être mis au service de l’égalité des populations marginalisées. Contrairement aux autoportraits de Rembrandt, qui représentent fidèlement l’artiste, ceux de Février rendent compte de la vision distordue que le monde de l’art se faisait auparavant de lui. Critiqué pour sa radicalité et son engagement, l’artiste suggère, par cette forme indéfinie, une entité en mutation qui accède au pouvoir et à l’autonomisation. L’œuvre traite des discours sur l’opposition entre visibilité et invisibilité, mais aussi de la manière dont les artistes de couleur prennent enfin leur place dans l’establishment. La fragilité du matériau, tout comme l’empreinte du papier bulle à sa surface, évoque une vulnérabilité révolue et annonce le début d’un temps nouveau.

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Objets de dévotion chrétienne

À partir du 13e siècle, on assiste à l’apparition de livres de prières, appelés « livres d’heures », qui sont produits à l’intention des laïcs. Contenant des textes et des illustrations de prières représentant la vie du Christ, de la Vierge Marie et de différents saints, ces livres de dévotion privée connaissent une grande popularité jusqu’au 16e siècle.

Ce triptyque illustre, de gauche à droite, trois épisodes marquants de la petite-enfance du Christ : l’Annonciation, la Nativité et la Circoncision (ou la Présentation au Temple). Peinte au début du 16e siècle à Bruges, la capitale de la peinture religieuse flamande d’avant la Réforme, cette œuvre possède des dimensions modestes qui donnent à croire qu’elle aurait été commandée par un mécène privé ou une famille à des fins de dévotion personnelle.

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Souvenirs des Cantons-de-l’Est

Henrietta Mabel May a peint Neige printanière, Knowlton alors qu’elle rendait visite à son amie et consœur du Groupe de Beaver Hall, Prudence Heward, qui vivait à la campagne.

Également inspiré du paysage québécois, le tableau Iron Hill de Peter Doig a été réalisé à partir des photographies personnelles et des images commerciales que l’artiste conservait dans ses archives. La scène se situe près de la maison familiale où Doig a passé une partie de son enfance.

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Quand le Mono-ha rencontre l’Arte Povera

Les mouvements Mono-ha (école des choses) et Arte Povera (art pauvre) ont fait leur apparition dans les années 1960, respectivement au Japon et en Italie. Ils ont été rapprochés l’un de l’autre en raison de leur exploration parallèle des matériaux non conventionnels, en réaction à l’essor fulgurant de la technologie et de la commercialisation et aux systèmes traditionnels des galeries d’art.

L’installation Placement of Unitary Situation de Kishio Suga est composée d’une pierre et d’une branche reposant précairement contre un fond rectangulaire minimaliste de couleur jaune, rythmé par trois barres horizontales. La tension entre les matières naturelles et les matériaux d’origine humaine, accentuée par leur équilibre instable, traduit le concept d’impermanence cher à la philosophie du mouvement Mono-ha.

L’œuvre Terra su terra – Volto [Terre sur terre – visage] de Giuseppe Penone est issue d’une série dans laquelle l’artiste combine des branches d’arbres avec des représentations de son visage et de ses mains. Toutes réalistes qu’elles soient, ces branches sont en fait des moulages de bronze. Appuyées les unes contre les autres, elles abritent un moulage en terre cuite reproduisant le visage de l’artiste, dans lequel s’enfonce l’empreinte de son poing – un plaidoyer poétique en faveur de la cohabitation harmonieuse de l’être humain et de la nature.

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Rapprochements formels

Par leur équilibre vertical et horizontal, le Troll de Robin F. Williams et le Breaking News (Midday in Eden) [Dernières nouvelles (midi dans l’Éden)] de Wanda Koop forment un duo fascinant, tant par leur structure formelle que par leur sujet.

La préoccupation de Koop pour la nature est flagrante dans sa représentation d’un arbre mort au milieu d’une scène embrasée par le feu qui renvoie aux incendies de forêt dévastateurs de 2020 en Australie.

Parallèlement, Williams associe références à la culture populaire et à l’histoire de l’art pour disséquer les discours américains sur l’enfance, l’identité et le genre dans des tableaux représentant des personnages féminins au milieu de scènes tantôt surréelles, tantôt banales. Troll foisonne de thématiques, de formules et de techniques dynamiques chères à l’artiste, telles que le sourire, les textures mixtes et le sujet stylisé, manifestement conscient de la présence du spectateur.

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En conclusion

En tant que responsables des œuvres de notre collection, nous devons veiller à leur conservation en les exposant en rotation et en les maintenant dans des conditions climatiques contrôlées. Ces œuvres sont présentées de temps à autre dans nos expositions (ainsi que dans le cadre de prêts à d’autres musées) et dans les salles de la collection permanente.

En plus des œuvres de Deux par deux rassemblés, vous trouverez d’autres acquisitions récentes dans les différentes salles de la collection permanente du MBAM, où elles sont identifiées par une mention spéciale. En outre, un certain nombre d’œuvres contemporaines récemment acquises ont été accrochées dans les salles adjacentes à l’exposition. Le Musée étant un organisme sans but lucratif, beaucoup de ses acquisitions proviennent de dons. Nous tenons d’ailleurs à exprimer notre profonde gratitude envers nos généreux bienfaiteurs et bienfaitrices, à qui nous devons bon nombre des œuvres majeures de notre collection.

Deux par deux rassemblés : ajouts récents à la collection du MBAM
11 septembre 2024 – 5 octobre 2025

Crédits et remerciements
L’exposition Deux par deux rassemblés : ajouts récents à la collection du MBAM est organisée par le Musée des beaux-arts de Montréal.

Le Musée reconnaît l’apport essentiel de son commanditaire officiel, Peinture Denalt, ainsi que celui de son partenaire média, La Presse.

Cette exposition a été réalisée en partie grâce à la participation financière du Conseil des arts du Canada, du Conseil des arts de Montréal et du gouvernement du Québec.

Le MBAM souhaite remercier les personnes qui ont généreusement offert en don les œuvres d’art présentées ici ou qui ont financé leur acquisition. Il souligne également la générosité de celles et de ceux qui soutiennent sa programmation, notamment les donatrices et les donateurs des Cercles philanthropiques de sa Fondation.

Nous remercions l’auteur-compositeur-interprète Pierre Lapointe de nous avoir permis d’utiliser le titre de l’une de ses chansons, « Deux par deux rassemblés », pour cette exposition.

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