Illustre représentant de l’orientalisme (pratique occidentale consistant à s’approprier les caractéristiques artistiques et culturelles orientales) sous la IIIe République en France, Jean-Joseph Benjamin-Constant est un remarquable coloriste néanmoins toujours attaché aux principes académiques. Il enseigne à l’Académie Julian où se pressent les élèves étrangers, dont les Canadiens Marc-Aurèle de Foy Suzor-Coté et Paul Peel. Sa notoriété internationale explique la présence d’œuvres majeures, dès les années 1880, dans les grandes collections des barons de l’industrie bancaire et ferroviaire de Montréal. Le peintre vient à plusieurs reprises en Amérique et séjourne à Montréal en 1888 pour préparer sa participation à l’Exposition universelle de 1889 à Paris où il présente ce tableau. Dans la perspective des arcades, le sultan et ses hommes opposent leurs attitudes droites et viriles, en accord avec les verticales de l’architecture monumentale, aux corps vulnérables des femmes allongées par terre. Ruisselantes de larmes et de cheveux, sans visage mais dénudées, elles sont déballées comme de vulgaires objets : l’effroi est suspendu.