Ce remarquable tableau raconte l’amitié entre deux compagnons artistes : Charles-François Daubigny et, comme celui-ci appelle son ami, « le père Corot ». Pionniers de la peinture en plein air, ces paysagistes sont des précurseurs de l’impressionnisme. Sur les conseils de Corot, Daubigny s’installe à Auvers-sur-Oise, à proximité de Paris, non loin de l’atelier d’Honoré Daumier. Ils entreprennent de décorer la nouvelle habitation : L’île heureuse est le plus beau des cinq panneaux réalisés par Corot pour le vestibule de Daubigny. Malgré des techniques de peinture innovantes, les « paysages-souvenirs » de la maturité de Corot tiennent davantage de l’esprit classique des maîtres du paysage français du XVIIe siècle Claude Lorrain et Nicolas Poussin. L’île heureuse est une des infinies variations inspirées au peintre par les eaux tranquilles d’un lac bordé de floconneuses frondaisons, dans les brumes de l’aube seulement troublées par d’incertaines figures paysannes. C’est une atmosphère de songerie recomposée où le peintre-poète préfère la sensation à la description, le ton à la couleur.