L’examen comparé de l’oeuvre sur papier et du tableau exposé dans nos salles révèle que le dessin est une étude préparatoire à la toile, remarquablement raffinée, qui fournit des détails et des indices sur la genèse du tableau. Dans cette version pourtant très achevée, comme en témoignent les rehauts de blanc dans la chevelure, sur la barbe et le visage, l’oreille gauche, dessinée d’un trait, n’est encore qu’une ébauche. L’esquisse diffère sur certains points du tableau, notamment dans le nœud de cravate flou – que l’artiste a manifestement retravaillé sur papier – et dans le col de la veste qui, dans la peinture, apparaît moins lâche (la veste ayant été sans doute boutonnée). Preuve supplémentaire qu’il s’agit d’un dessin préparatoire à la peinture, l’expression austère du visage a été adoucie, la bouche n’arbore plus ce rictus, les lèvres sont moins serrées et le regard de l’artiste paraît moins sévère. L’esquisse renvoie l’image de l’homme au travail, dont la nerveuse concentration perceptible dans le dessin est gommée dans la peinture, de façon à obtenir une version idéalisée du sujet.