Le pinceau d'or du Maître Bodo 2

La peinture de l’école de Kinshasa, dont Bodo est l’un des plus illustres représentants, joue un rôle historique : c’est avec elle, dans les années 1980, que l’Afrique pénètre le marché de l’art contemporain et le discours critique par son identité artistique reconnaissable, entre art naïf et imagerie surréaliste. Membre actif de la scène artistique émergente de Kinshasa, aux côtés de Chéri Samba et Moké, Bodo se convertit au christianisme. Ce pasteur prône « l’évangélisation mondiale ». Investissant sa peinture d’un rôle nouveau, il entreprend d’illustrer, par ses compositions panoramiques, la tentation des pêcheurs, détournés du droit chemin. Cette fable morale sur les tentations du sexe et les vertus rédemptrices de l’art se déroule au milieu d’une forêt verdoyante. La scène surréaliste est peuplée de personnages fantasmagoriques, mi-humains, mi-animaux : au volant d’un drôle de véhicule mi-humain, mi-éléphant, le conducteur, dans un habitacle vitré, éclaire une femme chic. Derrière elle, un homme porte un costume et une casquette jaune. C’est un « sapeur », c’est-à-dire un membre de la SAPE : « Société des Ambianceurs et des Personnes Élégantes », mode vestimentaire congolaise influencée par le dandysme lancée par les peintres de Kinshasa. À droite, le peintre tout sourire enserre ses pots de peinture, tel un Bouddha en lévitation, assis sur sa palette et reposant sur ses pinceaux.